yann rend son tablier
Le rideau est tombé. Mercredi 9 juillet, Léon le Cochon a servi son dernier festin, son dernier repas. Yann Paigier, cuisinier-patron-monsieur Loyal de la brasserie mythique de la rue Pré-Botté, a refermé la porte sur près de 30 ans de coups de feu. Trente ans à régaler une clientèle fidèle, bigarrée, affamée.
Léon le Cochon n’était pas un resto comme les autres. Dans son enchevêtrement de salles, sur plusieurs étages, cette ambassade du bon vivre était un repaire pour les mordus de bidoche. Ici, on croisait le maçon en salopette, le VRP en costard Devred, le patron de boîte ou le comédien. Tout le monde venait pour l’ambiance à la rennaise — et, il faut bien l’avouer, pour le chef au grand cœur.
Yann, c’était un fort en gueule, mais un vrai gentil. Loin des guinguettes lisses et fades, il tenait à son service à l’ancienne. Lui, plus qu’un autre, il aurait pu monter sur les planches, faire des sketchs ou courir sur un terrain de foot. Il a choisi les fourneaux. Par amour de la cuisine, du contact, de la bonne franquette et de son équipe.
Mais les temps changent. Le centre-ville ne s’encanaille plus. Il devient un musée sous cloche, sans places pour se garer, vidé par le télétravail et les applis de bouffe. Les bobos restent chez eux, bouffent des pizzas livrées par des migrants sous-payés. L’appétit fout le camp. Les bonnes adresses ne sont plus celles d’avant.
Il y a deux ans, pourtant, Yann y a cru. Un coup de pinceau, une nouvelle carte avec son fiston Camille et son complice Johnny. Du circuit court, du vrai produit, du plat qui a du terroir. Mais c’en était fini de la fête, de celle qu’on aimait. Le chef de la rue Pré-Botté a décidé de botter en touche. Il s’en va avec la lucidité de ceux qui savent quand le soufflé ne reprendra pas.
Mais l’homme peut quitter la scène la tête haute, le tablier plein d’anecdotes. Il aura tenu la dragée haute pendant trente ans. Mais ce n’est certainement pas une retraite, encore moins une mise en bière. Yann a de la ressource. On le reverra rallumer le feu, mettre du poivre là où la vie manque de goût. Et comme on dit sans doute chez lui : faut pas chialer dans la vinaigrette.
Crédit : Facebook, Léon le Cochon.
Les commentaires sont fermés.