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Fintech et innovation en Bretagne : entre essor local et régulation globale

Alors que l’écosystème financier se transforme sous l’effet des technologies numériques, la Bretagne s’impose comme un terrain fertile pour l’innovation. Pendant ce temps, la régulation et la structure de la finance décentralisée (DeFi) cristallisent l’attention des institutions. Entre ancrage territorial et mutations globales, le secteur entre dans une phase d’ajustement.

Une French Tech bretonne bien ancrée sur son territoire

Lancée en 2019, la communauté French Tech Bretagne Sud regroupe aujourd’hui plus de 70 startups réparties entre Lorient, Vannes, Pontivy ou encore Auray. Les domaines couverts — cybersécurité, biotechnologies, numérique, ou nautisme — témoignent d’une volonté partagée de créer une dynamique hors des grands centres urbains traditionnels.

Des entreprises comme DIMSI, Beam3 ou Medaviz montrent que l’innovation ne dépend pas d’une localisation parisienne. Cette concentration d’acteurs génère une intelligence collective propice aux échanges d’expertises, à la mutualisation de ressources et à une forme de résilience locale.

Un secteur fintech sous tension

Si cette dynamique locale est encourageante, le secteur fintech évolue dans un contexte plus tendu à l’échelle nationale. Dans un discours récent, Denis Beau, Premier sous-gouverneur de la Banque de France, a souligné la montée de plusieurs risques liés à la transformation du paysage financier.

Parmi ces tensions : la cybermenace, considérée comme le premier danger pour les institutions financières, l’immaturité de certains modèles économiques, notamment ceux du paiement fractionné, ou encore la dépendance à des prestataires tiers. Des signaux faibles qui, selon l’ACPR, pourraient déstabiliser la confiance si rien n’est fait pour structurer ces nouveaux marchés.

Finance décentralisée : entre potentiel et incertitude

Au cœur des discussions actuelles se trouve la finance décentralisée (DeFi). Basée sur des smart contracts et des blockchains publiques, cette approche remet en question le modèle classique de la banque comme intermédiaire. Elle permet des opérations de prêt, d’échange, d’investissement, voire de souscription à des assurances, de manière entièrement automatisée.

Ce modèle attire autant qu’il inquiète. Volatilité, réglementation encore floue et risques de sécurité soulignent les limites d’une technologie encore jeune. La chute brutale de certains protocoles comme Terra-Luna illustre cette fragilité.

L’émergence de ces pratiques s’accompagne également de l’essor de solutions plus accessibles, notamment à travers les plateformes de trading en ligne qui permettent à un public plus large d’interagir avec les cryptoactifs.

La régulation avance pas à pas

Pour encadrer cette évolution rapide, la Banque de France participe à plusieurs chantiers européens, dont le règlement MiCA sur les crypto-actifs. Elle expérimente également des dispositifs de monnaie numérique de banque centrale pour les paiements interbancaires et développe un cadre réglementaire autour de la finance ouverte (Open Finance).

L’objectif affiché : structurer sans brider, en instaurant un dialogue entre régulateurs et acteurs innovants. Des Tech Sprints, des hackathons et un centre d’innovation interne (Le Lab) sont autant d’initiatives pour aligner les réalités du terrain avec les exigences de sécurité et de transparence.

L’enjeu des compétences

Face à ces mutations, les métiers liés à la blockchain et à la DeFi se développent rapidement. Développeurs, analystes, juristes, ingénieurs sécurité ou encore data architects sont de plus en plus recherchés. Les formations se structurent, notamment dans les écoles de commerce, qui adaptent leurs Masters et MBA à ces nouveaux besoins.

Ce glissement vers une finance plus technique impose aussi une montée en compétences dans les territoires. Une opportunité à saisir pour des écosystèmes comme celui de la French Tech bretonne, où le lien entre formation, innovation et ancrage local peut jouer un rôle moteur.

Une transition encore en chantier

À la croisée des chemins entre innovation régionale, régulation nationale et mutations technologiques mondiales, la Bretagne illustre une réalité contrastée : celle d’un territoire qui innove vite, mais doit composer avec un secteur en transformation. Les équilibres restent fragiles, mais les initiatives existent pour faire de cette transition une réussite partagée.

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