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Construire une piscine : faudra rester dans les lignes !

Construire une piscine chez soi n’est plus un simple plaisir d’été : en Ille-et-Vilaine, cela devient un choix lourd de conséquences fiscales, réglementaires et symboliques. À partir du 1er janvier 2026, le conseil départemental appliquera le taux maximal autorisé de la taxe d’aménagement, soit 2,5 %, contre 1,85 % jusqu’ici. Cette hausse vise à alimenter un budget annexe consacré à la biodiversité et aux paysages, doté de 21,1 millions d’euros dans le budget primitif 2025. Toute installation nécessitant une autorisation d’urbanisme, comme une piscine, une extension ou un abri de jardin, sera concernée par la fiscalité. Le département espère en tirer 500 000 euros dès 2027, et 1,4 million en 2028.

En Ille-et-Vilaine, la majorité assume une fiscalité verte visant à financer la restauration de haies bocagères, les continuités écologiques et la renaturation de sites. L’opposition ne fait pas de résistance frontale sur le sujet, mais elle s’interroge sur la cohérence de l’effort.« Lorsqu’il y a des baisses de recettes dans le budget principal, vous réduisez les dépenses. Pourquoi ne pas faire de même ici ? », a interrogé Paul Lapause, conseiller départemental de Vitré, dans les colonnes d’Ouest-France.

Mais le virage est aussi urbain. Le 26 juin 2025, Rennes Métropole a adopté une modification importante de son Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi), comme l’a relevé le journal 20 Minutes. La nouvelle version impose désormais la récupération d’eau de pluie dans tous les logements neufs, pour alimenter toilettes et machines à laver. Et surtout, elle limite la taille des piscines privées à 25 m³ de volume d’eau sur l’ensemble des 43 communes de la métropole.

Ce seuil suscite des crispations. Certaines communes avaient déjà envisagé une interdiction totale qui a été retoquée, car illégale. « Ce n’était pas notre intention et de toute façon, ce n’est pas légal. Notre volonté, c’est de limiter le volume, dans l’intérêt collectif », a expliqué Laurence Besserve, vice-présidente de Rennes Métropole à l’urbanisme, toujours dans 20 Minutes. Officiellement, il s’agit de préserver la ressource en eau dans un département déjà en vigilance sécheresse depuis le 13 juin.

Les professionnels du secteur parlent d’un symbole plus que d’une mesure efficace. Joëlle Pulinx, déléguée générale de la Fédération des professionnels de la piscine (FPP), dénonce une « décision politique, pas écologique » dans le Télégramme. Selon la FPP, les 3,6 millions de piscines privées françaises ne consommeraient même que 0,08 % de l’eau annuelle du pays (FPP via 20 Minutes). Mais plusieurs institutions, dont le centre de ressource en eau, évoquent un chiffre sous-évalué. TF1 mettait en avant, à la même période, une surconsommation de 10 % par foyer disposant d’une piscine.

Après cette interdiction, les élus de l’opposition locale ne sont pas montés au créneau. « Cela s’inscrit dans une logique de gestion durable de l’eau », a reconnu Antoine Cressard. Les fabricants sont toutefois plus incisifs. « Une piscine, on la remplit une fois. Notre profession est responsable », a plaidé à nouveau Joëlle Pulinx (20 Minutes). Beaucoup redoutent toutefois un manque à gagner ! « La moitié de mes clients habite la métropole rennaise, et beaucoup construisaient des bassins plus grands que 25 m³ », indique l’un d’eux. À Cesson-Sévigné, Caroline Pelz, gérant d’Irripiscine, relativise toute foi dans le Télégramme. « Les projets s’étaient déjà adaptés à la taille des terrains. Le standard est autour de 7 x 3 mètres. Passer à 6 x 3 n’est pas dramatique », confie-t-elle.

BONNE NOUVELLE : L’OBLIGATION SYSTÉMATIQUE DE COUVERTURE POUR LIMITER L’ÉVAPORATION (ÉVITER JUSQU’À 95 % DE PERTE D’EAU).

Avec environ 3,2 millions de piscines privées, la France est championne d’Europe (FPP). Les bassins se concentrent surtout dans le Sud : Var, Bouches-du-Rhône, Gironde, Alpes-Maritimes. À l’étranger, les approches varient contre les méfaits de la prolifération des piscines : restrictions ponctuelles en Espagne, normes de sobriété en Californie, régulation légère en Allemagne ou au Royaume-Uni, incitations techniques en Australie. Mais pendant que les piscines enterrées font l’objet de toutes les attentions, les bassins hors-sol constituent une alternative en plein essor. Leur prix oscille de 100 à 10 000 euros (source : guide-piscine.fr, prix-pose.com, azialo.com). Et, elles sont soumises à des règles plus souples : pas de déclaration sous 10 m², publication préalable jusqu’à 100 m², et permis de construire au-delà (blog.urbassist.fr).

Pour l’instant, elles échappent à la taxe d’aménagement dans de nombreux cas, ce qui les rend attractives pour les ménages modestes ou les petits jardins urbains. Mais cette souplesse pourrait ne pas durer. Si leur usage se généralise, les collectivités pourraient chercher à encadrer leur installation, en imposant à leur tour des volumes maximums, des obligations de couverture ou des formes de taxation. Néanmoins, elles demeurent le dernier espace de baignade, à l’abri des contraintes fiscales et écologiques qui s’abattent désormais sur les bassins traditionnels. Photos : DR.

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