UN TIMBRE D’UN RENNAIS POUR VOS AFFRANCHISSEMENTS

Le 4 septembre 2023, La Poste émet un timbre à l’effigie de Jules Isaac. Elle met en valeur le co-auteur d’un célèbre manuel d’histoire et fondateur de l’Amitié judéo-chrétienne de France, à l’occasion des 60 ans de sa disparition. Ce timbre sera vendu en avant-première à Rennes, le vendredi 1^er et le samedi 2 septembre 2023, au Jeu de Paume, salle Pélican, de 10 h à 17 h, 12, rue Saint-Louis.

Jules Isaac est né à Rennes, dans une vieille famille israélite enracinée en France, en 1877. Son grand-père, cuirassier-trompette dans la Grande-Armée, avait combattu à Waterloo et était capturé par les Russes à la Bérézina. Son père avait gravi les échelons de carrière militaire, atteignant le grade de Chef d’Escadron sous le Second Empire malgré ses origines juives. Jules Isaac reçut une solide formation classique dans les lycées parisiens. Il y développa un intérêt particulier pour le grec, séduisant par la clarté du style et l’élévation de la pensée de certains penseurs comme Henri Bergson et Charles Péguy. 

Son amitié profonde avec Péguy l’engagea dans des luttes sociales et la célèbre affaire Dreyfus, en tant que défenseur du Droit. Après la défaite de la France en 1940 et la montée du régime de Vichy, Jules Isaac fut destitué de ses fonctions et chassé de l’Université française en raison de ses origines juives. Il se réfugia à Aix-en-Provence, puis au Chambon-sur-Lignon, où il vécut dans la clandestinité pour échapper aux persécutions.

Durant cette période troublée, une conversion religieuse profonde s’amorça en lui. Il se rapprocha du judaïsme et étudia les Évangiles, rédigeant des écrits qui mettaient en lumière l’écart entre les textes évangéliques et l’enseignement chrétien traditionnel sur les Juifs. En 1943, il commença à rédiger son livre majeur, « Jésus et Israël », qui exposait les faits historiques entourant la Passion de Jésus-Christ et remettait en question le rôle du sacerdoce juif dans son procès. L’ouvrage fut achevé après la Libération, et il persévéra à développer ses idées sur l’antisémitisme et la responsabilité des acteurs religieux dans cette question.

Jules Isaac a continué à lutter contre l’antisémitisme tout au long de sa vie et a publié d’autres recueils sur le sujet, tels que Genèse de l’antisémitisme et  L’Enseignement du mépris . Sa bataille acharnée contre le racisme et sa volonté de rapprocher les communautés religieuses en faisant valoir la vérité historique et le respect mutuel ont marqué sa place dans l’histoire de son temps. Sa quête de justice et de fraternité humaine a été le fil conducteur de son existence et de son œuvre.

Malgré la perte tragique de son épouse, Laure, et de sa fille, Juliette, dans les horreurs d’Auschwitz, Jules Isaac trouva le courage d’entamer un dialogue avec le monde chrétien. Il rappela la judéité de Jésus et démontra en fondant l’Amitié judéo-chrétienne de France. Sa visite au pape Jean XXIII le 13 juin 1960 joua un rôle décisif dans la modification du regard de l’Église sur le judaïsme. Cette rencontre aboutit à la déclaration « Nostra Aetate » du concile Vatican II, mettant fin à deux mille ans de mépris et d’ignorance. En ce sens, son travail fut à la fois prophétique et révolutionnaire. Il meurt en septembre 1963.