La Chope, c’était l’art et « Lamagnère »
Jean-Claude Lamagnère vient de tirer sa révérence, à l’âge de 87 ans. À Rennes, son nom claquait comme un souvenir joyeux. Il renvoyait à une époque où l’on sortait tard, où l’on riait fort et où les artistes étaient à la table du peuple, un verre à la main. Avec son frère, il a dirigé La Chope, institution rennaise du centre-ville, où le Tout-Rennes venait s’encanailler jusque tard dans la nuit, manger des choucroutes et déchiffrer des contrepèteries.
Fils de restaurateurs, Jean-Claude reprend en 1962 l’affaire familiale. Il la transforme. Il y ajoute de la cuisine (sole meunière, escargots, cuisses de grenouilles)… et du panache. Très vite, La Chope devient le QG des artistes en tournée, des comédiens, des chanteurs, des esprits libres. Trenet, Ferré, Brassens, Barbara, Depardieu, Bardot, Renaud, Higelin, Muriel Robin, Amélie Nothomb, Jean d’Ormesson… la liste est longue, comme en témoignent encore les photos sur les murs. Même Claude François y provoqua une mini-émeute de fans rue de la Chalotais.
Mais derrière cette vitrine de célébrités, il y avait un homme. Jean-Claude Lamagnère, personnage haut en couleur, drôle, généreux et curieux. Un vrai titi rennais, comme on n’en fait plus. Il savait accueillir, écouter, provoquer la rencontre. Il insufflait à son établissement une âme. À La Chope, on refaisait le monde, en mangeant des œufs mayo et en buvant jusqu’à pas d’heure. Bien avant que les bouillons ne pullulent dans notre belle ville.
C’ÉTAIT UN HOMME SOLAIRE, UN GRAND MONSIEUR », CONFIE DAVID, UN PROCHE.
Dans son établissement, les lycéens remettaient leur Goncourt, sous l’œil des caméras du monde entier, de France et de Navarre. Ils modernisaient la culture. Ils en faisaient une réalité vivante, loin des pédants, des coteries et des cultureux. Pour toutes ces raisons, Jean-Claude Lamagnère laisse un grand vide dans le cœur des Rennais, et dans la mémoire d’une ville. Place à une autre génération, qui — espérons-le — n’oubliera pas de choquer ses verres au nom des glorieux anciens. Paix à ton âme, Jean-Claude.



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